C’est en 1886 que la cartouche de 8x50 R a été adoptée, l’innovation de cette munition étant l’utilisation de la poudre sans fumée inventée en 1884 par Paul Veille. Cette poudre est désignée Poudre B puis renommée au gré des modifcations de sa composition en poudre BF en 1887, en poudre BN3F un peu avant le premier conflit mondial puis en poudre BFP1 avant 1940.
Entre sa création en 1886 et le second conflit mondial, la cartouche 8X50R Lebel a connu de nombreuses modifications qui ne sont pas l'objet de cette présentation. Seules sont traitées ici les cartouches employées en 1940 dans les régions fortifiées pour les armes de 8mm, soit la Mitrailleuse Mle 1914, le Fusil Mle 1886M93 et Mle 1907-15M16 ainsi que le Mousqueton Mle1892 et Mle 1892M16.
La cartouche est constituée d'un étui laiton de 50 mm pour une longueur totale d’environ 75 mm variant suivant le type de chargement. L’étui est de forme tronconique à bourrelet, il possède un amorçage Berdan (enclumette au centre du logement de l'amorce bordée de 2 évents).
L'amorçage est constitué d’une amorce en cuivre contenant la composition fulminante et d’un couvre-amorce en laiton. Le sertissage de l’amorce est réalisé par un listel rabattu sur un culot renforcé sous la désignation : (am) pour amorce modifiée. L’étui est alors désigné étui Mle 1886 D (am)
Plusieurs types de chargement ont existé:
Pour le tir réel
- Cartouche Mle 1886 D (am)
- Cartouche Mle 1932 N
- Cartouche à balle traceuse T
- Cartouche à balle perforante P
- Cartouche sans balle
Pour l’exercice :
- Cartouche de tir réduit à balle sphérique Mle 1895
- Cartouche de tir réduit à balle sectionnée
- Cartouche de tir réduit à balle fraisée
- Cartouche à blanc Mle 1897
- Cartouche à blanc Mle 1905
- Cartouche à blanc Mle 1905-27
Pour l’instruction
- Fausse cartouche Mle 1886
- Fausse cartouche Mle 1892
- Fausse cartouche Mle 1907
Ces différentes cartouche sont détaillées ci dessous
En 1898 est adoptée la balle D, inventée par le capitaine Désaleux, c’est en fait le profil "D" des propositions qui a été retenu. La balle est bi-ogivale monobloc en laiton 90/10 (soit 10 % de zinc pour 90 % de cuivre). Depuis 1905, cette balle possède une gorge de sertissage et pèse 12,80 grammes pour une longueur de 39,20 mm. A partir de 1917, le paillet d’étain de l’amorce Mle 1890 et remplacé par un paillet de papier.
La cartouche totale mesure environ 75 mm pour un poids total de 27,5 g avec une charge de poudre de 3 grammes de BN3F. La vitesse initiale V0 est de 700 m/s. L’étui est mle 1886 D (am).
Nota: A partir du milieu des années 20, on cherche à supprimer le couvre-amorce. Dés lors la SFM (Société Française de Munitions), fournisseur officiel, propose une cartouche avec une amorce SF de 6,35. Puis avec l’apparition de la cartouche de 7,5 mm, on utilise aussi l’amorce Mle 1924 A. De fait, les étuis sont désignés Etui Mle 1886 (sf) avec amorce de la SFM et Etui Mle 1886 (a24) avec l’amorce Mle 1924 A.
En 1932, on adopte une nouvelle cartouche à balle lourde destinée aux mitrailleuses. Il s’agit de la cartouche Mle 1932 N. L’étui est semblable à l’étui 1886 D (am) .Toutefois son diamètre au collet est légèrement supérieur. Aussi, la cartouche Mle 1932 N doit être tirée dans des armes ayant la chambre fraisée pour la recevoir (les armes sont ainsi modifiées N). L’amorce est du Mle 1890 et le couvre-amorce du Mle 1932, l’étui est alors désigné Mle 1886 N. La cartouche complète pèse 30 grammes pour une longueur totale de 75 mm.
La charge est constituée d’environ 2,94 grammes de poudre BFP1. La balle a le même profil que la balle D y compris une gorge, elle possède un noyau en plomb durci à l’antimoine, chemisé dans une enveloppe d’acier plaqué maillechort. Le poids est de 15,05 grammes pour une longueur de 39,35mm.
Cette cartouche est constituée d’un étui Mle 1886 D (am) et d’une balle D en laiton 90/10, étamée extérieurement pour son identification et évidée par l’arrière sur 10 mm par un diamètre de 6mm et renfermant une composition lumineuse. Le poids de la balle est de 11,20 grammes.
La charge comprend 3 grammes de poudre BFP1 pour une vitesse initiale V0 de 750 m/s. Il existe deux compositions traceuses. La première celle de l’ECP de Bourge est à base de magnésium et de nitrate de baryum, la couleur de la trace est blanche. La seconde composition traceuse, réalisée par l’atelier de Toulouse (ATE), est à base de magnésium et de nitrate de strontium, la couleur de la trace est rouge. La trace est visible jusqu’à 600 m environ.
C’est en 1915 que la cartouche à balle perforante étudiée par les Atelier de Puteaux (APX) a été adoptée. La balle perce les blindages et boucliers de 6 mm à 400 m. L’étui est du Mle 1886 D (am).
La balle perforante P est plus courte que la balle D, elle est constituée par une chemise épaisse de laiton 90/10 noircie chimiquement pour identification et un noyau cylindro-ogival pointu de 4 grammes en acier au carbone.
La balle P pèse 9,60 grammes pour une longueur de 32,50 mm. La charge est de 3,20 grammes de poudre BFP1 pour une vitesse initiale V0 de 840 m/s.
Cette balle présente l’inconvénient d’encuivrer rapidement les rayures des armes aussi il était recommandé une cartouche normale pour trois cartouches à balle P.
Cette cartouche sert au tir des cartouches signaux dans le lance-grenades Viven-Bessière et à l’instruction au tir des grenades VB. L’étui du Mle 1886 D (am) a le collet fermé par gaufrage et recouvert de paraffine .La charge est de 3 grammes de poudre BN3F.
Cette cartouche sert à l’entrainement en champs de tir restreint (environ 15 m). Elle utilise des balles sphériques de deux types. Le premier type est une balle sphérique en plomb cuivré qui pèse 3 grammes pour un diamètre de 8,15 à 8,20mm. Le second type est en plomb nu, le poids est de 2,50 grammes pour un diamètre de 8,45mm.
Les étuis sont souvent de récupération voire de rebut. La charge de poudre est constitué d’une feuille de papier nitré pliée en M. Le rechargement est réalisé en corps de troupe.
Cette cartouche est identique à la cartouche Mle 1886 D (am). La balle est sectionnée à 16 mm de la pointe afin de diminuer la portée. Cette cartouche qui pèse 25 grammes sert au fusil et mousqueton pour l’usage dans les champs de tir dont la profondeur est inférieure à 4,400 m. L’étui peut être neuf ou de récupération voire de contrats étrangers (US notamment). La cartouche s’utilise dans les chargeurs et dans le magasin tubulaire du fusil Mle1886 M93. La portée maximale de la balle est de 2200 m pour une vitesse initiale V0 de 50 m/s.
A noter, l’existence d’un appareil en corps de troupe permettant le sectionnement par sciage des cartouches à la cote de 16 mm.
Cette cartouche est réservée pour le tir aux armes automatiques, la cartouche à balle sectionnée ne permettant pas un approvisionnement correct. La cartouche est identique à la cartouche Mle 1886 D (am), elle pèse 27 grammes. La balle D est fraisée de deux méplats symétriquement opposés sur son ogive. La vitesse initiale V0 est de 710 m/s mais la portée et la précision n’excède pas 400 m.
Cette cartouche possède un étui Mle 1886 D (am), la balle est en papier- paille verni en vert. La partie arrière de la balle comporte un orifice permettant aux gaz de combustion d’y pénétrer et de la détruire à la sortie de l’arme. La charge est de 1,30 grammes de poudre EF. Cette cartouche d’un poids total de 13 grammes est destinée au fusil et mousqueton.
Cette cartouche possède un étui Mle 1886 D (am), la balle est en bois d’aulne naturel, évidée avec un profil pointu. La charge est de 1,30 grammes de poudre EF. Elle est destinée aux armes automatiques.
Certaines cartouches à blanc Mle 1905 ont eu les balles bleuies à l’occasion de réempaquetage
En 1927, on adopte un balle dont le profil est différent afin d’amincir les parois pour faciliter la fragmentation. La cartouche possède un étui Mle 1886 D (am). La balle évidée est en bois d’aulne teintée en bleu (protection contre l’humidité). La charge est de 1,30 grammes de poudre EF.
Cette fausse cartouche datant d’avant 1900 est toujours en usage en 1940, elle est réservée au fusil Mle 1886 M93 et n’est pas adaptée pour être utilisée dans les chargeurs qui l’abîment.
Elle est en bois de charme tourné et comporte un embout de cuivre ou de laiton de 15,50 mm riveté. Le culot de 14,80 mm également riveté est obtenu à partir d’un étui coupé. L’amorce est un couvre-amorce percé. Le culot peut être de type ART – ART M –ART D et D (am).
Cette fausse cartouche est composée d’un étui non amorcé comportant douze cannelures longitudinales, l’enclumette est arasée. La balle est du Mle 1886 à noyau de plomb chemisé cuivre qui coiffe une entretoise de bois en appui sur le fond de l’étui. Il existe deux variantes de cette fausse cartouche, l’étui étant ou non percé d’un trou de 3mm à 13 mm du culot. Elle est destinée aux fusils et mousquetons utilisant un chargeur. Le culot peut être du type ART M –ART D ou D (am)
Cette fausse cartouche est composée d’un étui Mle 1886 D (am) avec amorce inerte et percé à 15mm du culot. La balle est une balle D soudée à l’étain au collet. Il existe plusieurs variantes de cette fausse cartouche, dont les plus communes sont :
- Balle étamée et étui nickelé
- Cartouche entièrement étamée
- Cartouche entièrement nickelée
La fausse cartouche Mle 1907 est destinée à toutes les armes de 8mm y compris les mitrailleuses.
Les cartouches de 8x50R sont livrés en vrac (libre en paquet ou boite), sur chargeurs 3 ou 5 coups ou sur bande rigide pour mitrailleuses Mle 1914 (Hotchkiss).
Le chargeur de 3 coups est désigné Mle 1890.
Le chargeur de 5 coups dont il existe deux types est désigné Mle 1916 ou Mle 1916 à fond courbe (par opposition au chargeur à fond plat utilisé dans le FSA Mle 1917). Le chargeur Mle 1916 1er type possède une nervure de raidissement supérieur en trois segments, sur le 2ème type la nervure est simple.
La bande rigide pour mitrailleuse Mle 1914 est estampée dans une tôle en acier traité. Elle est de 24 coups.
L’empaquetage est différent suivant le type de chargement notamment la teinte de l’empaquetage et le nombre de cartouches.
La teinte goudron (brun clair) est utilisée pour les paquets des cartouches Mle 1886 D (am), en vrac par 8, par 12 en chargeurs Mle 1890 de 3 coups et pour les cartouches sans balle. Huit paquets de cartouches Mle 1886 D (am) constituent une trousse (64 cartouches).
Les marques des paquets sont imprimées sur le papier de l’emballage, dans plusieurs cadres superposés.
Elles indiquent, en principe, dans un des cadres : le modèle, la provenance le trimestre et de l’année de fabrication des étuis; le modèle et la provenance des balles; la nature, la provenance, le numéro et l’année du lot et, parfois, le poids de la poudre. Dans un autre cadre, l’origine et le jour de chargement des cartouches; leur nombre, leur modèle et, s’il y a lieu, leur mode d’empaquetage en chargeur Mle ..., etc.); le numéro de lot.
Lorsqu’il y a lieu, un cadre supérieur contient l’indication des armes auxquelles les cartouches sont destinées à la suite de leur lotissement ; ce cadre et les inscriptions qu’il contient son imprimés à l’encre rouge pour les armes automatiques, noires pour les armes à chargeur de 5 coups (Mle 1916), bleue pour les autres armes non automatiques.
Les cartouches de 8mm sont encaissées, soit en paquets de cartouches, de chargeurs, de bandes, soit en boites soit en trousses de paquet ou de boites. Elles sont livrées en caisses blanches Mle 1906-1923 suivant le tableau ci-dessous. Ces caisses ont un couvercle qui se rabat complètement le long de la caisse, après manœuvre des leviers de fermeture. Certaines comportent une caisse intérieure en zinc. L’ouverture des caisses en zinc luttée s’exécute par coulissement du couvercle, après enlèvement du lut par traction de ficelles placées dans les coulisses. L’ouverture des diverses caisses en zinc a fermeture soudée s’exécute en dessoudant chacune des quatre bandes de fermeture autour d’une clef spéciale. Le mode d’emploi est décrit sur une étiquette collée sur le couvercle de la caisse en zinc.
Les caisses blanches N°6 sont réservées au transport des cartouches sur bandes-chargeurs rigides. Les autres caisses et surtout les caisses N°3 conviennent à tous les modèles de cartouches.
Marques et signes distinctifs des caisses
Les marques comprennent en général : le modèle de la caisse et ses caractéristiques importantes (avec ou sans caisse intérieure en zinc, fermeture soudée), apposés sur un ou sur les deux grands cotés ; Le nombre, le modèle et, s’il y a lieu, le mode d’empaquetage des cartouches, avec l’indication des armes auxquelles elles conviennent ou des catégories d’armes auxquelles elles sont réservées.
Exemples :
- 1400 cartouches Mle 1886 D (am) en chargeur Mle 1916 - fusils, mousquetons
- 1500 cartouches de 8 m/m T en boites de 50
Une étiquette, collée le plus souvent sur chaque bout et sur le dessous du couvercle, reproduit le timbrage des paquets et des boites. Cette étiquette est sauf exceptions, du même modèle que celle des paquets et boites. En outres, les caisses contenant des cartouches classées « instructions » porte ce mot inscrit sur une étiquette, colées du même coté que les marques à la peinture.
Les chargements de certaines caisses sont caractérisés par certaines particularités des marques susvisées, ou par des signes distinctifs supplémentaires. Le modèle de la caisse N°3 est indiqué en noir sur un seul coté, les marques relatives au contenu de la caisse et les étiquettes reproduisant le timbrage des paquets et boites sont d’une couleur caractéristique :
- Pour les cartouches à balle D (am) – D (a24) : bleue ;
- Pour la cartouche à balle Mle 1932 N : marques noires – épars peint en vert.
- Pour les cartouches à balle perforante P : rouge ;
- Pour les cartouches à balle traceuse T : verte ;
- Pour les cartouches à ou fraisée balle sectionnée : violette ;
- Pour les cartouches à blanc : étiquette blanche, marques noires.